Jurisprudence - Circulation routière
I. |
Ivresse et intoxication alcoolique - Preuve - Matières pénales - Demande de contre-expertise sanguine non satisfaite - Formalité substantielle. |
II. |
Roulage - Excès de vitesse - Procès-verbal d'étalonnage signé par un seul verbalisant - Mention non prescrite à peine de nullité. |
1. L'imprégnation alcoolique est un délit dont la preuve est spécialement règlementée. La possibilité de demander et d'obtenir une contre-expertise est une formalité substantielle. A défaut, cette preuve irrégulière est dépourvue de toute valeur légale et ne peut être utilisée au titre de preuve libre, ce qui violerait le droit à un procès équitable.
2. En revanche, le fait que le certificat d'étalonnage du compteur du véhicule ayant servi à la constatation d'un excès de vitesse ne soit signé que par un seul des deux verbalisants n'entache nullement la régularité de la preuve.
(M.P. / J. G. )
(...)
Le tribunal est saisi de l'appel du prévenu G. contre les dispositions pénales du jugement entrepris limitées à la prévention B et de l'appel du ministère public à l'encontre du prévenu G.
Ces appels sont réguliers en la forme et ont été interjetés dans les délais légaux. (...)
Le 11 septembre 2011, alors qu'ils circulaient à bord d'un véhicule de service anonyme, sur l'autoroute A3 en direction de Bruxelles, les verbalisateurs ont eu leur attention attirée par un véhicule de marque Audi A5 immatriculé (...) circulant à vive allure.
Ils ont tenté de suivre ce véhicule qui circulait au moins à une vitesse réelle de 208 kilomètres par heure.
Ils ont intercepté ce dernier qui était sorti quelques centaines de mètres plus loin à la station Shell.
Le conducteur de ce véhicule, le prévenu G., a été soumis à un contrôle d'alcoolémie. L'éthylomètre a révélé un taux de 0,45 mg/litre d'air alvéolaire expiré.
Le prévenu G. a déclaré avoir bu cinq ou six verres dans un restaurant à Spa, dont le dernier vers minuit, et avoir circulé à très vive allure.
Il a subi un retrait immédiat de son permis de conduire du 11 septembre au 19 septembre 2011.
Il résulte de l'examen du dossier répressif, de l'instruction d'audience et de tous les éléments auxquels le tribunal peut avoir égard que la prévention A relative à l'intoxication alcoolique mise à charge du prévenu G. demeure non établie.
En effet, il ressort du dossier répressif qu'aucun prélèvement sanguin n'a été réalisé à titre de contre-expertise alors que celui-ci avait été spécifiquement demandé par le prévenu.
Il convient de rappeler que l'imprégnation alcoolique est un délit dont la preuve est spécialement réglementée par la loi.
Si cette preuve est récoltée de manière irrégulière, elle est dépourvue de toute valeur probante légale.
Toutefois, le juge pourra l'utiliser au titre de preuve libre, sauf si certaines conditions de forme sont prescrites à peine de nullité, si l'irrégularité commise entache la crédibilité de la preuve et si l'usage de cette preuve est contraire au droit à un procès équitable
[1].
Or, en l'espèce, la possibilité de demander et d'obtenir une contre-expertise est une formalité substantielle qui n'a pas été respectée.
Le prévenu doit donc être acquitté du chef de cette prévention.
Par contre, c'est en vain que le prévenu conteste la prévention B relative à l'excès de vitesse.
Devant le premier juge, le certificat d'étalonnage du compteur du véhicule de service ayant constaté l'infraction a été déposé.
Le fait que le procès-verbal d'étalonnage du 7 septembre 2010 déposé en instance ne comprenne que la seule signature de l'inspecteur Dupont et non celle de l'inspecteur Meunier ne constitue nullement un motif d'illégalité, cette mention n'étant pas prescrite à peine de nullité.
En outre, cette absence de signature n'entache nullement la régularité de la preuve.
Il résulte de ce qui précède que la prévention B demeure, quant à elle, établie telle que libellée.
La peine de 200 euros, majorée de 45 décimes et portée à 1.100 euros ou, en cas de non-paiement de cette amende, la déchéance subsidiaire du droit de conduire un véhicule à moteur pour une durée de trente jours, prononcée par le premier juge, du chef de la prévention B, demeure légale, adéquate et correspond à une juste répression, compte tenu de l'importance de l'excès de vitesse commis par le prévenu et des risques potentiels engendrés par ce dernier.
En outre, la gravité de cette prévention, le dépassement de plus de 40 kilomètres par heure par rapport à la vitesse autorisée, mais aussi les antécédents judiciaires du prévenu qui semble se jouer des condamnations prononcées à son égard et qui est décrit, dans le bulletin de renseignements, comme « un conducteur peu scrupuleux et imprudent », justifient le prononcé d'une déchéance du droit de conduire tout véhicule à moteur pour une durée de trois mois, comme l'a estimé le premier juge.
Le bulletin de renseignements versé au dossier répressif établit que le prévenu G. n'était titulaire de son permis de conduire que depuis le 19 mai 2010.
En application de l'article 38, paragraphe 5, des lois relatives à la police de la circulation routière, telles que modifiées par la loi du 7 février 2003 et par la loi du 20 juillet 2005, en cas d'infraction commise alors que le coupable est titulaire d'un permis de conduire depuis moins de deux ans, la réintégration du prévenu G. dans le droit de conduire doit être subordonnée à la réussite des examens théorique ou pratique.
Cette mesure légale et obligatoire prononcée par le premier juge sera confirmée.
Dispositif conforme aux motifs.
Siég. : Mmes V. Olivier, I. Collard et Me A. Römer.
Greffier : Mme D. Francoeur . |
M.P. : Mme M. Vivario. |
[1] |
Arrêt Antigone, Cass., 14 octobre 2003, R.C.J.B., 2004, p. 406. |