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07/09/2010
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Cour d'appel Liège (10e chambre), 07/09/2010


Jurisprudence - Régimes matrimoniaux

J.L.M.B. 11/54
I. Régimes matrimoniaux - Modifications - Modifications conventionnelles du régime légal - Clauses extensives du patrimoine commun - Apport en communauté - Apport d'une quotité d'un bien propre - Absence d'application de la faculté de reprise. .
II. Régimes matrimoniaux - Communauté légale - Régimes matrimoniaux - Liquidation - Avance sur la part de communauté - Avance consentie sur l'indemnité d'occupation.
1. Il y a lieu de distinguer le cas des biens apportés au patrimoine commun à concurrence d'une certaine somme de celui où un bien est apporté au patrimoine commun dans une certaine proportion. Dans cette hypothèse, le bien apporté se trouve en indivision entre le patrimoine commun et le patrimoine propre de l'époux apporteur. L'article 1454 du code civil, d'application stricte, ne s'applique pas à un tel apport.
2. La demande d'avance sur part de communauté à concurrence d'une portion de l'indemnité d'occupation due à l'épouse doit être admise, lorsque, d'une part, celle-ci se trouve dans une situation financière difficile et que, d'autre part, les droits qu'elle pourra faire valoir lors du partage sont établis.

(S. / R. )


Antécédents
Les faits de la cause et son objet ont déjà été relatés par la cour dans son arrêt du 20 avril 2010.
Il suffira d'ajouter ce qui suit :
Les parties se marient le 16 décembre 1989. Elles sont divorcées par jugement du 18 mai 2006, suite à une citation du 20 février 2004.
Elles ne s'entendent pas sur la liquidation de leur régime matrimonial de communauté avec clause d'apport, dressé le 6 décembre 1989 par maître Réard.
Elles ont formulé plusieurs contredits qui ont été tranchés par le premier juge.
L'appelant maintient ses contredits concernant l'apport qu'il a fait de 1360/1610èmes d'un immeuble lui appartenant en propre. Il s'oppose à ce que l'intimée puisse percevoir une avance sur les indemnités d'occupation telle qu'allouée par le premier juge.
Les autres points ne font plus de discussion.
Discussion
Apport
La clause figurant au contrat de mariage est claire : l'appelant déclare apporter et faire entrer dans le patrimoine commun 1360/16I0èmes d'une maison d'habitation sise à ..., les autres quotités restant lui appartenir. Cet apport est fait au patrimoine commun à charge pour lui de supporter en principal, intérêt et accessoires la dette du prêt consenti par la Société nationale terrienne du 12 juillet 1979, la dette s'élevant au jour du contrat de mariage à 1.360.000 francs. Il est, en outre, prévu que l'appelant ne bénéficiera pas de la faculté de reprise prévue à l'article 1455 du code civil.
Les quotités apportées s'expliquent donc par l'état de remboursement du prêt, l'appelant se réservant la propriété d'une quote-part de l'immeuble en fonction de la dette restant due au jour du mariage.
L'article 1454 du code civil vise l'apport d'un bien déterminé dont la valeur est indiquée dans le contrat de mariage, l'apport pouvant être limité à une certaine somme. En l'espèce, l'appelant n'a pas apporté un bien déterminé dont la valeur a été mentionnée pour une certaine somme mais bien une quotité déterminée d'un bien immeuble dont il se réservait le caractère propre pour le surplus des quotités apportées au patrimoine commun. La fraction mentionnée au contrat détermine bien la quotité dont l'appelant se réserve la propriété exclusive. Il s'agit d'une technique juridique différente de celle de l'article 1454 du code civil car, dans le cas de ce dernier article, le bien apporté tombe entièrement dans le patrimoine commun ; il n'existe pas d'indivision entre le patrimoine commun et le patrimoine propre de l'époux apporteur (H. Casman, M. Van Look, Les régimes matrimoniaux, Kluwer, chapitre 2, Extension de l'actif commun, p. 127 et suivantes, et Liquidation et partage, commentaire pratique, Kluwer, III. 1.4-26, p. 168).
Les quotités mentionnées au contrat ne sont pas une valeur au sens de l'article 1454, d'autant plus que l'appelant déclare lui-même que la valeur de la maison était plus importante puisqu'il avait reçu le terrain de ses parents en donation et qu'il avait mis de sa main-d'oeuvre personnelle dans la construction dudit immeuble. Il a choisi cette formule lors de la rédaction de son contrat de mariage estimant que la communauté devait recevoir une contrepartie de ce qu'elle allait payer le prêt contracté pour l'acquisition de cet immeuble. On doit se tenir aux termes du contrat, lequel fait la loi des parties.
L'apport est en principe gratuit en ce sens que l'époux qui effectue l'apport n'a aucun droit à récompense, sauf stipulation contraire du contrat de mariage et sauf si l'apport ne se fait qu'à concurrence d'une certaine somme. Or, en l'espèce rien n'a été prévu. Il y a lieu de bien distinguer le cas des biens apportés au patrimoine à concurrence d'une certaine somme et celui où le bien est apporté au patrimoine commun dans une certaine proportion, car comme déjà dit, dans cette hypothèse, le bien appartient pour partie au patrimoine commun et pour partie en propre à l'un des époux. Lorsque le bien est apporté au patrimoine commun à concurrence d'une certaine somme, lors de la dissolution du régime, ce bien suit le sort des autres biens du patrimoine commun et la récompense se calculera en fonction de la valeur qui a dû être mentionnée au contrat de mariage en respectant l'article 1454. Ce n'est que dans cette hypothèse bien spécifique que l'époux apporteur a contre la communauté une récompense égale à la différence entre la valeur de ce bien au jour de l'apport et la somme à concurrence de laquelle le bien a été apporté. Les auteurs font tous la distinction entre l'apport d'un bien avec valeur déterminée et l'apport d'une quotité (voy. Y.H. Leleu et L.
Raucent, Régimes matrimoniaux, Rép. not., 2002, p. 1014, n° 1227, et note 4,
n° 1231 ; L. Raucent, Les régimes matrimoniaux, 3e édition, 1986, p. 287, n° 341 ; Ph. De Page, Le régime matrimonial, 2003, p. 202, n° 210). L'on ne se trouve donc pas dans le cadre de l'article 1454 en l'espèce, Y.-H. Leleu spécifiant que cette forme d'apport n'est pas de pratique courante.
L'article 1454 du code civil est ainsi d'application stricte et ne peut viser les termes du présent contrat de mariage.
Le jugement doit donc être confirmé à cet égard.
Indemnité d'occupation
Les parties ne s'entendent pas sur l'évaluation de l'indemnité d'occupation - pas plus que sur la valeur de l'immeuble - mais, depuis la séparation, l'appelant occupe exclusivement l'immeuble, qui héberge toutefois aussi l'enfant commun.
Depuis mai 2008, l'emprunt est remboursé et l'intimée demande à pouvoir obtenir une avance sur sa part de communauté à concurrence d'une portion de l'indemnité d'occupation, étant dans une situation financière précaire.
L'appelant s'y oppose estimant que l'indemnité d'occupation fait partie des comptes d'indivision à calculer dans le cadre de la poursuite des opérations de liquidation-partage.
Le premier juge a parfaitement rencontré la problématique de l'avance sur communauté par de judicieux motifs que la cour fait siens sans devoir les paraphraser.
La doctrine estime qu'il y a lieu d'examiner avec une certaine souplesse la demande de provision de l'ex-conjoint sur ce qui lui revient de toute façon après la liquidation-partage.
Trop souvent, l'un des ex-époux se trouve dans une situation financière délicate alors que l'on sait pertinemment qu'il percevra un capital important lors de la clôture du partage. On conçoit difficilement que cet époux reste privé pour une durée inutilement longue des revenus de sa part. La demande d'une telle provision est dissociée tant de l'article 213 du code civil que de l'article 301 du même code, de manière telle qu'aucune preuve d'indigence n'est nécessaire. Le montant à allouer sera évalué en fonction des droits que le demandeur pourrait, selon toute vraisemblance, faire valoir dans le cadre de la liquidation-partage. Ce n'est en tout état de cause pas une liquidation-partage partielle (voy. H. Casman et M. Van Look, Régimes matrimoniaux, Avance sur la quote-part dans la liquidation, TV7-1, p. 131, Rema 45, 1er avril 2008 ; Y.H.Leleu, " Actualités de droit familial. Le point en 2001. Jurisprudence en matière de liquidation et de partage du patrimoine conjugal ", n° 32 et suivants, et Rev. not., 2001, p. 685 et suivantes).
Comme relevé dans l'arrêt du 20 avril 2010, l'appelant jouit du plus important avoir de la communauté, et ce depuis 2004 tandis que l'intimée ne retire aucun revenu de l'indivision post-communautaire et est elle-même dans une situation financière très difficile. On sait déjà en tout état de cause que l'appelant devra une somme importante à l'intimée et que l'avance mensuelle accordée ne comblera que faiblement ce qui est dû à l'intimée, vu les intérêts qui continuent à courir. L'avance allouée n'est pas de nature à porter atteinte définitivement et irrémédiablement aux droits des parties, en ne perdant d'ailleurs pas de vue que l'intimée est propriétaire tout comme l'appelant de l'immeuble que ce dernier occupe.

Par ces motifs, ...
Confirme la décision entreprise dans toutes ces dispositions et renvoie la cause aux notaires commis pour qu'ils poursuivent leur mission conformément aux principes dégagés dans le jugement et le présent arrêt.
Dit que les dépens liquidés à 2.400 euros par l'appelant et 2.400 euros par l'intimée sont des frais privilégiés de partage à prélever comme tels sur la masse à partager.
Siég. :  Mme M.-A. Derclaye.
Greffier : M. W. Reynders.
Plaid. : MesJ.-M. Defourny, F. Greffe et D. Lange.

 



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Sommaire

  • 1. Il y a lieu de distinguer le cas des biens apportés au patrimoine commun à concurrence d'une certaine somme de celui où un bien est apporté au patrimoine commun dans une certaine proportion. Dans cette hypothèse, le bien apporté se trouve en indivision entre le patrimoine commun et le patrimoine propre de l'époux apporteur. L'article 1454 du code civil, d'application stricte, ne s'applique pas à un tel apport.

    2. La demande d'avance sur part de communauté à concurrence d'une portion de l'indemnité d'occupation due à l'épouse doit être admise, lorsque, d'une part, celle-ci se trouve dans une situation financière difficile et que, d'autre part, les droits qu'elle pourra faire valoir lors du partage sont établis.

Mots-clés

  • Régimes matrimoniaux Modifications - Modifications conventionnelles du régime légal - Clauses extensives du patrimoine commun - Apport en communauté - Apport d'une quotité d'un bien propre - Absence d'application de la faculté de reprise. Régimes matrimoniaux Communauté légale - Régimes matrimoniaux Liquidation - Avance sur la part de communauté - Avance consentie sur l'indemnité d'occupation

Date(s)

  • Date de publication : 25/02/2011
  • Date de prononcé : 07/09/2010

Référence

Cour d'appel Liège (10 echambre), 07/09/2010, J.L.M.B., 2011/8, p. 371-373.

Branches du droit

  • Droit civil
  • Droit civil > Régimes matrimoniaux

Éditeur

Larcier

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