Jurisprudence - Droit commercial - Continuité des entreprises
Continuité des entreprises - Réorganisation judiciaire - Absence de documents essentiels devant être joints à la requête en réorganisation - Irrecevabilité de la requête . |
Une affirmation vague et générale faisant état de difficultés, non étayée par une situation comptable à moins de trois mois certifiée fidèle par un professionnel du chiffre externe à l'entreprise ni par une prévision de recettes et de dépenses au moins pour la durée du sursis - deux conditions pourtant explicitement requises à peine d'irrecevabilité - ne permet pas au tribunal d'examiner si la continuité de l'entreprise est menacée. Une requête à ce point lacunaire est dès lors irrecevable.
(S.P.R.L. B. )
(...)
1. La S.P.R.L. B. a pour activité les travaux de terrassements et autres activités similaires. Par requête déposée le 14 août 2013, elle a sollicité l'ouverture d'une procédure de réorganisation judiciaire par accord collectif en vue d'obtenir que soit préservée, sous le contrôle d'un juge délégué, la continuité de son entreprise.
2. Par ordonnance du 14 août 2013 prononcée en application de l'article 18 de la loi, Monsieur Bernard Pietquin, juge consulaire près la juridiction, a été appelé aux fonctions de juge délégué.
Le 22 août 2013 il a présenté au tribunal son rapport, dont il ressort :
« le dossier déposé est incomplet et ne répond pas au prescrit de la nouvelle loi sur la continuité des entreprises. Il y manque - l'exposé des événements ... - les deux derniers comptes annuels ... - la situation comptable de moins de trois mois établie sur la base de l'article 17, paragraphe 5 - un budget recettes-dépenses (paragraphe 6) ... Malgré mes efforts ... je ne peux donc éclairer le tribunal ».
3. Bien que ce que produit la requérante semble tout de même constituer les comptes annuels de deux exercices consécutifs, comme requis par l'article 17, paragraphe 2, 4°, de la loi, l'examen du dossier joint à la requête confirme, pour le surplus, les conclusions du juge délégué.
Hormis des formulations vagues telles « que suite à différents événements, (la requérante) se trouve actuellement dans une situation financière particulièrement délicate menaçant à bref délai sa continuité », la requête et le dossier y joints n'exposent quasi pas des événements justifiant de la demande.
Surtout, sont complètement absents du dossier :
- « une situation comptable qui reflète l'actif et le passif et le compte de résultats ne datant pas de plus de trois mois. Le demandeur joint à la requête une déclaration dans laquelle un expert-comptable externe ou un réviseur d'entreprise exprime son opinion quant à la question de savoir si la situation comptable reflète fidèlement la situation et les résultats du débiteur » (article 17, paragraphe 2, 5°, de la loi),
- « un budget contenant une estimation des recettes et dépenses, pour la durée de la suspension demandée au moins, préparé avec l'assistance d'un expert-comptable externe ou d'un réviseur d'entreprise ... » (article 17, paragraphe 2, 6°, de la loi).
4. La loi du 27 mai 2013 modifiant diverses législations en matière de continuité des entreprises est entrée en vigueur le 1er août 2013. Elle modifie l'article 17 de la loi en ce sens que les pièces requises par cette disposition doivent être jointes à la requête à peine d'irrecevabilité (article 17, paragraphe 2, de la loi).
Le tribunal peut, notamment, « si une omission ou une irrégularité dans le dépôt de documents n'est pas d'une nature telle qu'elle empêche le tribunal d'examiner si les conditions prévues à l'article 23 sont remplies et si elle peut être réparée par le débiteur (...) mettre l'affaire en continuation » (article 24, paragraphe 1er, de la loi).
Ledit article 23 dispose que la procédure de réorganisation judiciaire est ouverte lorsque la continuité de l'entreprise est menacée, à bref délai ou à terme.
5. Une affirmation vague et générale faisant état de difficultés, non étayée par une situation comptable à moins de trois mois certifiée fidèle par un professionnel du chiffre externe à l'entreprise, ni par une prévision de recettes et dépenses pour à tout le moins la durée demandée du sursis - deux conditions pourtant explicitement requises à peine d'irrecevabilité par la loi depuis le 1er août 2013 - ne permettent pas au tribunal d'examiner si la continuité de l'entreprise est menacée.
La première des deux conditions cumulatives auxquelles l'article 24, paragraphe 1er, de la loi subordonne la mise en continuation de la cause en vue d'une régularisation du dossier n'étant ainsi pas rencontrée, la cause ne peut être mise en continuation.
La requête est irrecevable.
Dispositif conforme aux motifs.
Siég. : MM. Savatic, Remy et Vulhopp.
Greffier : M. Parmentier. |
Plaid. : MeG. van Nuffel. |