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21/06/2016
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Cour d'appel Liège (12e chambre), 21/06/2016


Jurisprudence - Droit administratif

J.L.M.B. 16/969
Expropriation - « Emprises provisoires » - Occupation temporaire .
L'occupation provisoire par l'expropriant de certaines zones non expropriées n'implique pas que ces zones soient expropriées de fait dès lors que le propriétaire reste propriétaire desdites zones même s'il est privé de leur usage et jouissance durant une période déterminée nécessaire à la réalisation des travaux publics et que cette privation est indemnisée.

(A.I.D.E. / S.A. Arcelor et S.A. Cockerill )


Vu le jugement rendu le 23 avril 2015 par le tribunal civil de Liège, division de Liège.
Antécédents et objet de l'appel
Les faits et objet de la demande ont été correctement relatés par le premier juge à l'exposé duquel la cour se réfère.
Il suffit de rappeler ce qui suit.
la S.A. Arcelor a introduit une action en révision dans le cadre de l'expropriation par la société publique de gestion de l'eau (S.P.G.E.) de plusieurs emprises sur des parcelles dont A. B. était propriétaire à Seraing.
L'association intercommunale pour le démergement et l'épuration des communes de la province de Liège, A.I.D.E., est le maître de l'ouvrage délégué de la S.P.G.E.
L'opération d'expropriation avait pour objet la réorganisation du démergement des eaux dans la plaine alluviale de Seraing qui était jusqu'alors réalisée par deux stations de pompage et deux réseaux de collecte : la station de pompage n°6 de l'A.I.D.E. (publique) et la station de pompage Cockerill-Collard (privée et appartenant à Arcelor).
L'expropriation a été autorisée par un arrêté du ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du territoire et de la Mobilité de la Région wallonne du 8 juillet 2013.
Le tableau des emprises annexé à cet arrêté prévoit trois types d'emprises : des emprises en pleine propriété pour un total de 3.089,66 mètres carrés, des emprises en sous-sol pour un total de 776,01 mètres carrés et des emprises provisoires pour un total de 2.723,91 mètres carrés.
la S.A. Cockerill était emphytéote des emprises 10 à 23 et 27 à 34.
La S.P.G.E. a saisi le juge de paix du canton de Seraing par requête du 18 septembre 2013.
Par un premier jugement du 17 octobre 2013, il a dit l'expropriation régulière et a alloué à Arcelor et Cockerill une indemnité provisionnelle de 18.982,18 euros et a désigné l'expert Didier Goffaux pour un rapport descriptif et estimatif des biens expropriés.
Par un second jugement du 6 mars 2014, il a fixé l'indemnité provisoire sur la base de l'avis rendu par l'expert judiciaire, soit 40.840,85 euros.
Le premier juge a considéré que l'expropriation était illégale notamment en ce qu'elle vise des emprises provisoires.
Appel a été interjeté par l'A.I.D.E.
Arcelor conteste les montants de l'indemnisation.
Discussion
En instance comme en appel, l'A.I.D.E. affirme que l'action en révision serait irrecevable au motif que la citation d'instance ne serait pas assez motivée quant au dommage découlant d'une expropriation illégale.
La lecture de cet acte permet la conclusion que la S.A. Arcelor a exposé de manière suffisamment détaillée les faits et les moyens qu'elle a développés en cours de procédure et sur lesquels l'A.I.D.E. a pu longuement s'expliquer.
Le moyen n'est donc pas fondé.
Seuls certains points de divergences subsistent entre parties :
Les emprises provisoires
À cet égard, l'intimée, suivie en cela par le premier juge, estime que le fait de prévoir une expropriation provisoire revient à forcer l'exproprié non à vendre mais à louer l'usage de son bien pendant la durée des travaux et considère que l'article 16 de la Constitution ne revoit pas ce type d'expropriation et qu'il s'agit en conséquence d'un détournement de procédure.
Actuellement Arcelor poursuit dans cette argumentation en précisant que la notion d'emprise provisoire est une construction d'opportunité, inventée par le pouvoir expropriant sans le moindre fondement légal dans le seul but de limiter les coûts d'expropriation et facilit[er] les travaux en ayant accès aux lieux pendant une période limitée.
Arcelor estime que soit il ne s'agit pas d'une expropriation et rien n'est prévu par la loi, soit il s'agit d'une expropriation qui alors ne peut être temporaire.
En réalité, comme le souligne pertinemment l'appelante, seule la sémantique pose problème et l'usage du terme inapproprié « emprise provisoire ».
Dans les faits, il y a expropriation en sous-sol pour y déposer ses conduites puis expropriation de certaines parties en pleine propriété pour le placement des cheminées autorisant l'accès aux conduites. En dehors de ces parcelles, lesquelles sont clairement visées dans l'arrêté d'expropriation, les parties de terrains erronément appelées emprises provisoires constituent simplement une occupation temporaire des lieux le temps nécessaire à la réalisation des travaux. Ces parties de terrains n'entrent jamais en possession de l'expropriant. Dès lors que les travaux sont terminés, les conduites sont enterrées et l'intégralité du terrain, sur lequel les travaux ont eu lieu et nommée « emprise provisoire », est restituée dans sa jouissance aux parties expropriées.
Ces restrictions au droit de propriété, nécessaires à la réalisation du projet public et liées à des expropriations, doivent être indemnisées mais ne peuvent l'être comme s'il s'agissait d'une expropriation sensu stricto dès lors que seule la jouissance de la plénitude du droit de propriété durant un temps déterminé est contrariée.
L'occupation provisoire par l'expropriant de certaines zones non expropriées n'implique pas que ces zones soient expropriées de fait dès lors que le propriétaire reste bien propriétaire desdites zones même s'il est privé de son usage ou jouissance durant une période déterminée nécessaire à la réalisation de travaux publics et que cette privation est indemnisée.
En d'autres termes encore, l'indemnisation des parcelles dites emprises provisoires est une conséquence de l'expropriation et non une expropriation en tant que telle.
Cette position a été admise à plusieurs reprises par la jurisprudence et la doctrine.
L'exception d'illégalité est donc non fondée.
Reste que le propriétaire est privé durant le temps des travaux et sans contestation possible de la plénitude de son droit. Dès lors, même s'il n'est pas démontré que par le passé ces terrains ont été loués, la référence à la valeur de location reprise par l'expert pour indemniser ce trouble de jouissance est adéquate.
Les emprises provisoires sont de 2.723,91 mètres carrés.
L'indemnité telle que précisée par l'expert doit donc être fixée à 0,25 euro par mètre carré mensuellement sur une période envisagée de vingt-deux mois de travaux.
Si, comme il l'est soutenu, la durée des travaux devait s'avérer supérieure, il appartiendrait aux parties expropriées de solliciter une indemnisation supplémentaire au maître de l'ouvrage en tenant compte de ces principes et valeurs. (...)

Dispositif conforme aux motifs.

Siég. :  Mmes Ch. Malmendier, M. Wilmart et M. L. Noir.
Greffier : Mme M.- Ch. Schumacker.
Plaid. : MesJ.-M. Rigaux, P. Bayard et Fr. Englebert (loco Y. Moreau).

 



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L'occupation provisoire par l'expropriant de certaines zones non expropriées n'implique pas que ces zones soient expropriées de fait dès lors que le propriétaire reste propriétaire desdites zones même s'il est privé de leur usage et jouissance durant une période déterminée nécessaire à la réalisation des travaux publics et que cette privation est indemnisée.

Mots-clés

Expropriation - « Emprises provisoires » - Occupation temporaire

Date(s)

  • Date de publication : 03/11/2017
  • Date de prononcé : 21/06/2016

Référence

Cour d'appel Liège (12 e chambre), 21/06/2016, J.L.M.B., 2017/35, p. 1657-1659.

Traduction

Hof van beroep Luik, 21/06/2016

Branches du droit

  • Droit public et administratif > Droit constitutionnel > Droits et libertés - art. 8-32 > Liberté - art. 12-32
  • Droit public et administratif > Expropriation > Autres

Éditeur

Larcier

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